KIROMBWE, UNE PAROISSE QUI RECONCILIE

KIROMBWE, UNE PAROISSE QUI RECONCILIE

« Cette nouvelle paroisse de Kirombwe vient au moment opportun pour que ses habitants réalisent ensemble leur destinée d'être chrétien non en parole mais dans le concret de notre quotidien ». Erigée canoniquement en date du 24 septembre 2022 par S.E. Mgr Gervais Banshimiyubusa, Archeveque de Bujura.

  1. La Paroisse, lieu de la résurrection

Si Saint Jean Marie Vianney, le curé d'Ars, disait qu’en laissant une paroisse vingt ans sans prêtres, les chrétiens adorent des bêtes, qu'en est-il du peuple de Dieu sans paroisse? Il devient la proie des doctrines des loups rapaces. "Tous les sangliers des forêts ravagent la vigne du Seigneur" (Ps 80, 14), le peuple de Dieu subit la dispersion et chacun prend son sentier qui ne mène nulle part. Saint Paul, dans son discours d'adieux prononcé devant la communauté d'Éphèse prévient aux chrétiens ce qui va leur arriver (Actes 20, 28-35).

Kirombwe, comme cette communauté sans identité juridique, qu'est la paroisse, et par là sans prêtre permanent qui le guide dans "les verts pâturages de la grâce" (Ps 23), vivait dans la captivité. Pour prendre en dérision cette zone martyrisée jadis par les affrontements continus des belligérants qui ont causés, à côté des morts, tant de blessures intérieures et des traumatismes, quelqu'un pouvait dire, comme Nathanaël, à un prêtre ressortissant: "de Kirombwe, peut-il vraiment sortir quelque chose de bon ?"

Quand la nouvelle nous est parvenue que finalement cette terre «abandonnée», sera bientôt érigée en une Paroisse, notre bouche était pleine de rire. Nous étions dans une grande fête. On disait parmi les nations: quelle merveille fit pour eux le Seigneur? Nous étions en grande fête (Ps 126,1-3). Qui sème dans les larmes moissonne dans la joie ! (Ps 126, 5)

C'est effectivement dans un contexte de grande fête, le jour des ordinations sacerdotales, un jour mémorable et inoubliable, ce samedi du neuf juillet deux mille vingt-et-deux dans la Paroisse Sainte Anne de Musaga, que son S.E. Mgr Gervais Banshimiyubusa, mû par sa sollicitude et préoccupation pastorale, a annoncé la nouvelle. Certains pouvaient se demander: est-ce que notre pasteur a été inspiré par sainte Anne, la sainte patronne de la paroisse de Musaga où a eu lieu les ordinations ou par sainte Rita de Cascia? Nous ne pouvons pas répondre à ces questions, seulement "Dieu a ses temps et ses saisons" dans son action salvifique, si nous empruntons les paroles chères du grand théologien, Hans Urs Von Balthasar.

  1. La Paroisse, lieu du pardon et de la réconciliation

Saint Paul disait: "Laissez-vous réconcilier avec Dieu" (2Cor.5, 20). Le pardon est la gratuité de Dieu qui montre sa miséricorde aux pécheurs que nous sommes. En tant que grâce envers celui qui méritait la punition selon la justice, la réconciliation est le mouvement de rencontre pour recoudre le tissu de l'amitié et de la fraternité rompue. En grec, la réconciliation "katallasso", signifie justement l'ouverture qui change l’inimitié et l’hostilité en un rapport nouveau d’amitié et de concorde. Ce mouvement est rendu possible par le Christ présent dans son église, dans la communauté qui se nourrit de sa parole et de son pain eucharistique, qui reçoit son pardon dans le sacrement de la confession.

Sans la paroisse, les chrétiens qui doivent parcourir tant de kilomètres pour aller prier, quelques fois avec retard, finissent par tomber dans l'acédie spirituelle et dans l'oubli de l'essentiel de la foi. Dans ces circonstances, ils sont exposés à toutes les tempêtes. On est, certes, baptisé sans être chrétien, car la vie chrétienne est un petit grain qu'il faut arroser, entretenir à tout moment et Dieu donne la croissance. La réconciliation est impossible là où il n'y a pas de communauté soudée par l'eucharistie. C'est pourquoi, cette nouvelle paroisse de Kirombwe vient au moment opportun pour que ses habitants réalisent ensemble leur destinée d'être chrétien non en parole mais dans le concret de notre quotidien.

  1. La Paroisse, lieu de promotion spirituelle et sociale.

Jésus dans son allégorie du bon pasteur dit qu'il y aura un seul troupeau et un seul pasteur (Jn 10,16). Dans sa prière sacerdotale il dit: "Que tous soient un" (Jn 17,21). Là où il y a l'unité dans la riche diversité, il y a la paix et le développement. La paroisse, comme «communauté précise de fidèles constituée d’une manière stable dans l’Église particulière» (c.515 §1), a cette vocation, voire un charisme de susciter la promotion de tout homme et de tout l'homme.

Comme le disait Saint Paul VI, dans son encyclique, populorum progressio"le développement est le nouveau nom de la paix". Quand le peuple est enraciné dans la parole du Christ, communie à son corps et à son sang, son corps mystique s'élève harmonieusement vers la clef de voûte, l'Unique Nécessaire selon les paroles du philosophe français, Maurice Blondel, car qui converge monte et qui monte converge d'après Teilhard de Chardin.

C'est donc ce levain dans la pâte de l'humanité qui manquait dans la zone de Kirombwe. A mon avis, avec la création de cette Paroisse, toutes les énergies formeront une synergie dans un accord parfait, comme pour former un tissu sans couture, la communauté non psychologique dont les fins sont uniquement la survie et le sauve qui peut, mais une communauté charismatique marquée par l'attention à l'autre, l'attente dans l'action du ciel nouveau et de la terre nouvelle. À Kirombwe, "le désert fleurira". Rendez grâce au Seigneur, car il est bon, car éternel est son amour (Ps 118,1). Ces mots du psalmiste qui contiennent un message fort, je les retourne en dédicace à la communauté de la nouvelle Paroisse.

Puisse le Seigneur qui a fait grâce à son peuple l’aider dans le réveil de conscience afin d’être toujours prêt à contribuer activement à la construction et au développement de la jeune Paroisse. Qu’Il bénisse et fortifie notre pasteur, l’Archevêque de Bujumbura qui a daigné répondre à notre requête et nous offrir ce cadeau inoubliable. Seigneur, toi qui dans ta providence nous a maintenus en vie au milieu des tempêtes, nous te rendons grâce. Maintenant que tu nous fais crier de joies, je comprends que tout ce que nous avons dû affronter nous préparait à recevoir, le moment venu, ce don  précieux et nécessaire pour notre croissance spirituelle.

Merci Seigneur pour avoir voulu que nous passions par une purification comme l’or que l’on vérifie par le feu, afin que, le moment venu tu puisses nous montrer ta puissance en changeant la tempête en brise.

Abbé Epitas Ngendakuriyo