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« Nous sommes les ambassadeurs de la réconciliation »
L’Eglise catholique a célébré samedi le 29 décembre dernier le 15ème anniversaire de l’assassinat de Monseigneur Michael Aidan Courtney à Minago.
Quatre évêques avaient fait le déplacement : Mgr Joachim Ntahondereye, Evêque de Muyinga et président en exercice de la Conférence des Evêques Catholiques du Burundi, Mgr Gervais Banshimiyubusa, Archevêque de Bujumbura et Administrateur apostolique du diocèse de Ngozi, Mgr Wojciech ZALUSKI actuel Nonce apostolique au Burundi, ainsi que l’Evêque du lieu, Mgr Venant Bacinoni qui présidait les cérémonies.
Une dizaine de prêtres et quelques religieuses des paroisses voisines de Minago étaient également présents, ainsi que quelques centaines de fidèles paroissiens. Les pèlerins se sont retrouvés dans le recueillement au lieu du drame à 3 km de Minago sur la route nationale n3 qui va de Bujumbura vers la Tanzanie en passant par Rumonge. Après la prière, il y a eu un dépôt de gerbes de fleurs à la mémoire du Nonce assassiné : celle de la Conférence des Evêques Catholiques déposée par Mgr Joachim Ntahondereye, celle de la Nonciature apostolique qui a été portée par Mgr le Nonce Apostolique et celle de la communauté chrétienne locale.
En ouvrant les cérémonies, Monseigneur Venant Bacinoni, Evêque de Bururi a retracé les circonstances du drame qui a emporté la vie de Mgr Michael Courtney. Il disait en substance :
“Nous sommes réunis aujourd’hui à cet endroit pour faire mémoire de Mgr Michael Courtney, le Nonce apostolique qui a été assassiné ici le 29 décembre en 2003. Il rentrait à sa résidence à Bujumbura après un séjour de deux jours dans le diocèse de Bururi où il avait eu des entretiens avec son confrère de Bururi feu Mgr Bernard Bududira. Il était venu lui faire ses adieux étant donné que son mandat au Burundi venait d’expirer. Arrivé à cet endroit, il a été pris dans une embuscade de criminels. J’étais avec lui – poursuit-il –, je n’ai eu la vie sauve que grâce à la main providentielle de Dieu. Nous sommes venus ici pour faire mémoire de lui et pour remercier Dieu pour tant de biens que Mgr Michael Courtney a fait pour le Burundi. A plusieurs reprises Mgr Michael Courtney avait appelé les parties en guerre à déposer et à faire taire les armes pour faire parler les parties en guerre autour d’une table de négociations. Je pense que c’est pour avoir tenu ces propos qu’il a été assassiné ; je ne vois aucune autre raison de ce crime, car c’était un homme intègre. C’est une honte qui a été jetée sur notre pays le Burundi. Profitons de cette occasion et prions pour notre pays, pour que prennent fin de tels agissements… ».
« Qui a tué Mgr Michael Courtney » ?
Les cérémonies se sont poursuivies à l’église Sainte Famille de la paroisse Minago où la communauté chrétienne a pris l’heureuse habitude de se retrouver chaque année à la même date pour faire mémoire de Mgr Michel Courtney. Au nom de la communauté chrétienne de Minago, le président du Conseil paroissial dit ne pas comprendre le pourquoi de cet acte ignoble ; « Qui l’a tué, pourquoi ? Si ces gens sont encore en vie, nous aimerions les connaitre pour nous réconcilier avec eux et les inviter à se convertir et à demander pardon ». A l’endroit des évêques présents, il formule quelques aspirations: « Soyez plus près de nous pour améliorer la qualité des cérémonies de cette journée de mémoire, car Mgr Michael Courtney était pour tous les diocèses du Burundi ». Il estime que le petit monument érigé à l’ endroit du drame devrait être réhabilité. Cette demande avait déjà été formulée les années précédentes. Mgr Joachim Ntahondereye, président de la Conférence des Evêques Catholiques l’a bien reconnu au cours de son allocution. Il a promis que la question sera portée auprès à la réunion des évêques. Il a exprimé le désir de voir qu’un jour les auteurs de ce crime soient traduits en justice : « avec vous je souhaite qu’un jour, la justice nous dise les noms des auteurs de ce lâche assassinat, pour que nous puissions les porter dans notre prière et pourquoi pas entreprendre un exercice (umwimenyerezo) de réconciliation avec ceux qui nous ont offensés en le tuant».
« Nous sommes des ambassadeurs de la réconciliation ».
Rappelons que Mgr Michael Courtney était de nationalité irlandaise, il était né en 1945, il avait été ordonné prêtre en 1968 quand il avait fait sienne la devise paulinienne « nous sommes des ambassadeurs de la réconciliation ». Par la suite, il avait été curé de paroisse dans sa région natale jusqu’en 1976 avant d’aller à Rome pour y poursuivre ses études en Théologie morale, en Droit canonique et à l’Académie pontificale de Diplomatie. Il a exercé sa carrière en diplomatie vaticane en Egypte, en Afrique du Sud, au Zimbabwe, en Inde, au Cuba, à Strasbourg auprès du Conseil de l’Europe et à la Cours Européenne des Droits de l’Homme. Mgr Michael Courtney était arrivé au Burundi en Août de l’année 2000 et son départ de Bujumbura était prévu en janvier 2004.
Mgr Venant Bacinoni qui l’a côtoyé de près Mgr Michael Courtney indique que l’Eglise du Burundi admire en lui « un homme d’une profondeur relationnelle exceptionnelle, un homme qui s’était pleinement engagé dans la recherche de la paix au Burundi par la réconciliation et qui osait en prendre les risques ».
Zénon Nzeyimana.