MEMOIRE DES MARTYRS DE BUYENGERO, VINGT CINQ ANS APRES LE DRAME

MEMOIRE  DES MARTYRS DE BUYENGERO, VINGT CINQ ANS APRES LE DRAME

Une fois de plus, la communauté chrétienne paroissiale de Buyengero et tout le Diocèse de Bururi, les amis et la communauté des Pères Xavériens, se sont retrouvés autour du mausolée où reposent les leurs : Père Ottorino Maule, Père Aldo Malchiol et Mademoiselle Catina Gubert. C’était le samedi 26 Septembre 2020.

Vingt cinq ans après le drame !

L’occasion était plutôt exceptionnelle cette année étant donné que cela fait déjà vingt cinq ans que le drame a eu lieu en cette soirée du 30 septembre 1995. Les trois martyrs se reposaient paisiblement dans le living-room du presbytère. Priaient-ils ? Mangeaient-ils ? Bavardaient-ils ? Ils étaient tout simplement entrain de faire ce pourquoi ils étaient venus : des missionnaires de la Bonne Nouvelle, des missionnaires de la paix de Jésus Christ. Ils ont été mortellement surpris par des armes meurtrières de leurs bourreaux, tous les trois sont tombes sur le champ de la mission. Ce sont les trous percés dans le mur qui indiquent aux pèlerins la cruauté et la violence avec lesquelles ils ont été tués.

Pour cette année, c’est Monseigneur Salvator Niciteretse qui a présidé aux cérémonies. Outre la communauté des fidèles de la paroisse et quelques dizaines de prêtres, l’Evêque de Bururi était entouré par trois Evêques: Mgr le Nonce Apostolique, Mgr Bonaventure Nahimana du Diocèse de Rutana et Mgr Blaise Nzeyimana de Ruyigi ; il était entouré aussi par la communauté des missionnaires Xavériens qui vivent au Burundi et en RD Congo. Après un recueillement de prière auprès du monument ou reposent les martyrs, l’Evêque de Bururi a souhaité la bienvenue à tous les pèlerins particulièrement les Evêques et les Missionnaires Xavériens, et il a introduit l’assemblée dans la principale intention du jour. «J’ai la joie d’être aujourd’hui avec vous la communauté chrétienne de Buyengero. Je viens  me joindre à vous pour une action de grâces  à Dieu qui nous a manifesté sa bienveillance à travers la présence et le sacrifice des missionnaires, les Pères Xavériens Aldo, Ottorino et la volontaire Catina ». Il a, ensuite, exprimé ses condoléances aux familles des victimes, à la Congrégation des Missionnaires Xavériens en général, à sa communauté résidant au Burundi, à la communauté chrétienne de Buyengero et à tout le Diocèse de Bururi.

Des pèlerins de plusieurs  horizons

Parmi les pèlerins, il y avait quelques anciens qui ont connu les missionnaires assassinés. Les visages tristes et interrogateurs, ils évoquaient douloureusement les souvenirs des leurs : Père Aldo, Père Ottorino et la volontaire Catina. Parmi ces pèlerins, on était aussi frappé par la présence de nombreux jeunes. Ils n’étaient pas encore nés le jour du drame, mais ils savent que quelque chose de très grave s’est passé chez eux. Que des  missionnaires innocents ont perdu la vie alors qu’ils étaient au service de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ chez eux. Pendant toute la célébration, ils ne bougeaient pas d’un seul pied, ils chantaient pour Dieu en Kirundi; en français et en kiswahili en priant le Seigneur pour les martyrs qu’ils n’ont pas connus. Leurs visages tristes semblaient accuser les ainés de ne pas pouvoir leur dire la vérité : Qui a tué ces envoyés de Dieu? Pourquoi une telle abomination? Et quand la justice sera-t-elle faite en leur faveur ?

D’autres pèlerins, encore plus jeunes étaient présents, des gamins. Ils se disputaient les places sur les premiers bancs ou sur les branches des arbres autour de la tribune de prière. Plus joyeux que tous les autres, ils sont beaucoup plus occupés  à compter le nombre de voitures, le nombre de personnes de peau blanches ou le nombre de prêtres. Sauvés par leur innocence, ils ne savent pas encore qu’ils sont nés sous un ciel où la violence est encore,  malheureusement pour certains, un triste recours pour régler les différends et les conflits.

Parmi les pèlerins il y avait aussi quelques Missionnaires Xavériens du Burundi et de la RD Congo voisin. Par la bouche d’un parmi eux, ils ont exprimé les souffrances et les espérances qu’ils portent depuis le jour du drame. Ils espèrent que du sang de leurs deux confrères Aldo et Ottorino et de celui de leur volontaire Catina versé, la terre burundaise fera pousser une nouvelle plante qui  produira des fruits de la paix en abondance.

Un autre pèlerin  d’honneur était Monseigneur Wojciech Zaluski, le Nonce Apostolique au Burundi. Arrivé avec un léger retard, il a été ovationné par des applaudissements de l’assemblée. Prenant la parole, il a déclaré que l’objet de sa présence était en même temps saint et douloureux : la mémoire des missionnaires assassinés. Il a exprimé le souhait de voir aboutir dans un bref délai les travaux du projet de béatification  des trois martyrs.

Il y avait aussi des pèlerins empêchés : les familles des martyrs. Depuis longtemps elles avaient souhaité et promis de venir se joindre à la communauté chrétienne de Buyengero pour les vingt cinq années passées. Ils n’ont pas pu le faire à cause du confinement consécutif à la pandémie du Covid-19. Le Père Mario a lu à l’assemblée une lettre écrite en italien par Sœur Carmelina, une des sœurs de feu Père Ottorino. Néanmoins, elles ont pu suivre la messe grâce à la retransmission en direct de la messe réalisée par les bons soins de Radio Maria Burundi.

Des croix de la violence

A ces familles et à toute l’assemblée présente, Mgr Salvator a déclaré que « Le Burundi est malheureusement un pays qui a la triste habitude de porter des croix de la violence sans en finir. Nous les portons depuis plusieurs décennies et elles sont extrêmement lourdes à porter, des croix qui n’ont même pas épargné les missionnaires de Dieu. Pourquoi avons-nous toujours choisi les voies de la mort ? Les martyrs pour lesquels nous prions aujourd’hui sont morts dans les mains de Dieu, ils ont été précédé dans le royaume par tout le bien qu’ils avaient réalisé ici chez vous et ailleurs. Et pour cela, croyez-moi, ils ne sont pas morts, ils dorment du sommeil de la paix éternelle ».

Le mot de la fin

Avant le départ des pèlerins, le mot de la fin a été prononcé par Mgr Leonidas Nitereka, le Vicaire Général du Diocèse de Bururi. Selon lui,  « Nos trois martyrs missionnaires ont donné leur vie pour l’annonce de l’Evangile, ils ont librement choisi de partager avec nous la vie et ils sont allés jusqu’au bout, ils ont été emporté par la violence qui était entrain de nous décimer nous les burundais. Pour dire que le missionnaire est celui qui prend part à la vie et à la mort de ceux pour qui il annonce la Parole de Celui qui a partagé tout avec l’humanité y compris la mort ».

Aldo, Ottorino et Catina, reposez-vous dans la paix !

 

Zénon Nzeyimana